Le régime de la protection sociale

La principale différence entre le détachement et l’expatriation résulte du fait que le salarié expatrié n’est plus affilié au régime français de Sécurité sociale.
 
Détachement temporaire :
Ainsi, il n'est pas rare de lire qu'en cas de détachement temporaire, le maintien du système de sécurité sociale du pays d'origine soit garanti. Les salariés travaillant à l'étranger pour le compte d'une société française peuvent bénéficier des dispositions conventionnelles relatives à la participation. Les modalités de calcul et la répartition de la réserve spéciale de participation entre les salariés bénéficiaires ne peut pas faire l'objet d'une distinction suivant que les salariés d'une même entreprise travaillent en France ou à l'étranger (Cass. soc., 29 oct. 2002 : TPS 2003, comm. 84 ; JurisData n° 2002-016120).
Pour le surplus, l'accord collectif peut prévoir la souscription ou le maintien par l'employeur d'une couverture santé complémentaire destinée à parfaire la protection sociale du collaborateur et des membres de sa famille à l'étranger, sous couvert d'un contrat de prévoyance collective ou individuelle souscrit auprès d'une compagnie d'assurance, d'une mutuelle ou d'un organisme de prévoyance. De même, le régime collectif de prévoyance en vigueur dans l'entreprise peut prévoir des règles particulièrement avantageuses pour les personnels envoyés à l'étranger (par exemple, CCN personnel des entreprises de pâtes alimentaires et de couscous non préparé, Avenant III (ingénieurs et cadres), 3 juill. 1997, art. 4).
 
 
Expatriation :
À l'inverse, lorsque le salarié est véritablement expatrié, les dispositions légales prévoient la perte en principe du bénéfice du régime de sécurité sociale applicable (CSS, art. L. 762-1 et s.). Aussi, les règles conventionnelles mettent, le plus souvent, à la charge de l'employeur une obligation d'information en direction de l'intéressé, notamment au sujet de la possibilité qui lui offre le Code de la sécurité sociale de conserver une affiliation au régime français en s'inscrivant volontairement auprès de la Caisse des Français de l'Étranger (CFE). Dans un tel cas, la norme conventionnelle peut prévoir le versement d'une prime supplémentaire liée à la situation d'expatriation, afin de lui permettre de faire face au coût que représentent les cotisations à la CFE.
Certaines dispositions conventionnelles sont plus avantageuses car elles obligent l'employeur à organiser la protection sociale du salarié et des membres de sa famille par delà le maintien du bénéfice du régime légal. Ainsi, l'article 14 de la Convention collective nationale des personnels navigants techniques des entreprises de transport aérien et assimilés indique qu'“en cas de déplacement, de détachement ou d'affectation temporaire, hors du champ d'application géographique du régime général de la sécurité sociale, l'entreprise prend les mesures nécessaires pour que les garanties sociales du régime général ou des régimes complémentaires (régime maladie, accident du travail et vieillesse de la sécurité sociale, CRPNP, Assedic) dont il bénéficie au moment du déplacement, du détachement ou de l'affectation temporaire soient maintenues au navigant ou, en cas d'impossibilité, que lui soient assurées des garanties analogues sans augmentation de taux de la part salariale des charges sociales”.
 
Ainsi, la règle est que l’expatrié est affilié au régime de protection sociale du pays dans lequel il exerce sa mission.
Néanmoins, afin de pallier les carences du système de protection sociale du pays d’accueil, l’expatrié salarié ou non salarié a la possibilité de bénéficier des droits et prestations du régime de Sécurité sociale français en adhérant au régime d’assurance volontaire de la Caisse des français de l’étranger (CFE). Le régime spécifique élaboré pour les français résidant à l’étranger est donc fondé sur le principe d’une assurance volontaire.
 
La CFE est un organisme privé en charge du service public de la sécurité sociale. La demande d’affiliation doit être introduite dans les 3 mois suivant le départ ou le début de l’activité à l’étranger et au plus tard, avant l’expiration d’un délai d’un an. Les cotisations versées à la CFE sont en principe à la charge du salarié, mais rien n’interdit à l’employeur de les prendre en charge, même partiellement.
 
Le salarié français expatrié à l’étranger ne bénéficie plus du régime français de sécurité sociale. Il est affilié au régime local du pays d’accueil. Sa protection va alors varier selon les législations. D’où l’intérêt de s’affilier volontairement à la Caisse des français à l’étranger (ce qui ne le dispense pas de l’obligation d’être assujetti au régime local) : double cotisation.
 
Les avantages de ce système résident dans la souplesse, la continuité et le cout de l’adhésion :

  • La souplesse : le salarié peut choisir les risques contre lesquels il veut s’assurer : principe d’affiliation volontaire à la carte ;
  • Le coût : l’adhésion à la CFE coûte environ 3 fois moins cher que la solution du détachement (légal, conventionnel ou communautaire) ;
  • La continuité : CFE constitue le trait d’union avec la sécurité sociale française, en ce sens que le salarié pourra dès son retour en France, bénéficier de la protection sociale du régime français, sans qu’un délai de carence ne puisse lui être opposé.

 
Les inconvénients de ce système sont :

  • Le niveau des remboursements : la CFE ne rembourse les prestations que dans la limite des tarifs applicables en France, ce qui peut s’avérer insuffisant si le salarié est expatrié vers un pays dans lequel les soins sont onéreux ;
  • L'adhésion à la C.F.E. ne dispense pas toujours de régler des cotisations dans le pays d'expatriation. Si la cotisation au régime local de sécurité sociale est obligatoire (c’est le cas le plus fréquent en pratique), le salarié est soumis à une double cotisation.

 
Elle couvre deux risques pour lesquels elle assure tant le recouvrement des cotisations que le service des prestations :

  • Le risque maladie, maternité, invalidité ;
  • Le risque ATMP : accidents du travail, maladies professionnelles.

 
En outre, la CFE recouvre, pour le compte de la Caisse Nationale d’assurance vieillesse les cotisations d’assurance vieillesse.
 
Pour le risque maladie, maternité, invalidité:
Les prestations en nature sont les mêmes que celles du régime général : frais médicaux, médicaments, hospitalisations. Elles sont prises en charge dans la limite des tarifs de remboursement en vigueur en France (70%). Pour les frais d’hospitalisation, l’assuré doit faire l’avance et demander ensuite le remboursement à la CFE.
Les prestations en espèces (indemnités journalières et capital décès) ne sont dues que si le contrat d’assurance le prévoit (optionnel).
 
Pour le risque ATMP :
Tous les soins et arrêts de travail sont pris en charge au profit de l’assuré.
Pour les frais, le remboursement s’effectue sur la base des tarifs français. Quant aux indemnités journalières et rentes d’incapacité, tout dépend de l’option choisie.
Et si, à son retour en France, l’assuré a encore des séquelles, la coordination avec le régime français est assurée.
 
Pour le risque vieillesse :
Le salarié peut décider de cotiser auprès de la CFE qui va reverser les cotisations à la Caisse nationale (française d’assurance vieillesse). Les périodes d’assurance obligatoire et facultative se cumulent pour calculer la retraite qui sera perçue.
 
Il est possible de souscrire une assurance complémentaire auprès de :

  • la CRE (Caisse des retraites pour les expatriés employés, cadres et non cadres), qui est membre de l’ARRCO (complémentaire retraite employés) ;
  • l’IRCAFEX (cadres) qui est membre de l’AGIRC (organisme de retraite complémentaire des cadres).

 
Pour le risque chômage :
Le Code du travail (article L.5422-13) fait obligation à tout employeur établi en France d’assurer ses salariés contre le risque perte d’emploi, même si ces derniers ont le statut d’expatrié (ou de détaché) au regard de la Sécurité Sociale.
Mais, ce principe ne joue que pour ceux qui sont expatriés dans un pays non membre de l’UE ou EEE. Dans ce cas, l’affiliation au GARP (Association des risques professionnels) est obligatoire si et seulement si un contrat de travail lie toujours le salarié et l’employeur d’origine. Sinon, elle est facultative.
Les salariés expatriés dans un Etat membre relèvent obligatoirement du régime local d’assurance chômage en vigueur dans la pays d’accueil (conditions d’affiliation et prestations) : égalité de traitement et totalisation des périodes.
La question de l'assurance chômage est peu traitée dans les conventions et accords collectifs de travail. En effet, cette question est délicate à aborder dans des textes généraux et collectifs dans la mesure où leur présence serait de nature à inquiéter, plus qu'à rassurer, les candidats à l'expatriation. Dès lors, cette question est plutôt traitée à l'oral, lors des entretiens qui précèdent le départ de l'intéressé, ou dans une mention écrite lapidaire portée sur la lettre de mission ou l'avenant au contrat de travail.
 
Prévoyance et prestations sociales :
La protection sociale du salarié est organisée en termes de prestations sociales par les normes supranationales telles qu'issues des traités diplomatiques ou des normes communautaires. Par voie de conséquence, les dispositions conventionnelles ne sont pas d'une importance première. Le plus souvent, elles se contentent d'informer les candidats au départ sur le régime social qui découle des textes supranationaux pour les salariés détachés à l'étranger ou expatriés (par exemple, CCN des cabinets de métreurs-vérificateurs, 16 avr. 1993, annexe IV, déplacements à l'étranger concernant les contrats de travail pour les déplacements ou affectations à l'étranger, avenant 1er juin 1994).
 
Retraite :
En matière de retraite le problème est un peu différent dans la mesure où la constitution d'une pension vieillesse ne dépend pas seulement de la législation de sécurité sociale. Les régimes complémentaires de retraite, obligatoires et facultatifs, ont également leur importance. Aussi, devant la complexité de la situation, certains accords collectifs se limitent à des formules lapidaires qui n'éclairent pas beaucoup le salarié sur l'étendue de ses droits. Par exemple, certains accords se contentent d'indiquer que “les cadres en fonction à l'étranger continuent à souscrire aux régimes de retraite et de prévoyance du pays d'origine dans la mesure du possible”. Cependant, depuis le 1er janvier 2000, les régimes de retraite complémentaire obligatoires, AGIRC et ARRCO, relèvent des règles de coordination communautaire applicables à l'assurance vieillesse du régime général. Par conséquent, le problème est beaucoup plus simple (V. Déclaration du Gouvernement français : Journal Officiel des communautés européennes 28 Juillet 1999). Dès lors, les normes conventionnelles relatives à la retraite devraient connaître une amélioration de leur rédaction sur le thème de la retraite.